
Dans un contexte international où les diasporas jouent un rôle de plus en plus structurant dans les dynamiques politiques, sociales et culturelles de leurs pays d’accueil comme d’origine, l’absence quasi-totale de la diaspora sahraouie sur la scène politique européenne, et plus particulièrement en France, interpelle. Cette discrétion contraste fortement avec l’intensité du conflit du Sahara qui reste, depuis cinq décennies, l’un des plus anciens conflits non résolus du continent africain.
Alors que d’autres communautés – maghrébines, subsahariennes, kurdes ou palestiniennes – ont su organiser des espaces d’expression politique, de lobbying ou de plaidoyer, la très importante communauté sahraouie semble enfermée dans un silence presque institutionnalisé. Peu d’associations visibles, peu de relais dans les institutions, aucune figure publique reconnue au niveau national ou européen : un vide qui mérite réflexion. C’est à se demander si cette absence n’est pas voulue.
En France, où pourtant la tradition de soutien aux causes internationalistes est bien ancrée, le poids de la diaspora sahraouie reste marginal, voire inexistant dans le débat public. Il ne s’agit pas ici de pointer un manque de volonté individuelle, mais bien de souligner l’absence d’un projet collectif structuré. Plusieurs facteurs peuvent expliquer cet effacement : fragmentation communautaire, pression politique, précarité administrative, ou simple désillusion vis-à-vis d’un conflit qui s’éternise sans perspective claire.
Mais cette invisibilité n’est pas sans conséquence. Elle laisse le champ libre à d’autres narratifs, souvent portés par des États ou des groupes puissamment organisés, qui imposent leur lecture du conflit. Elle prive aussi les jeunes Sahraouis nés en Europe d’un espace de transmission politique et culturelle, les éloignant encore davantage d’une cause qui, pourtant, les concerne profondément.
La responsabilité est collective. Elle incombe autant aux médias et leaders sahraouis qu’aux militants associatifs, aux intellectuels qu’aux jeunes générations. C’est sentant ce déficit que nous avons décidé la création de cette plateforme, non pas dans le but de nous approprier l’espace public, mais de créer un espace pour donner la parole à cette diaspora, lui permettant de contribuer au dialogue, de former des porte-voix capables d’exister dans l’arène politique européenne. Non pas pour crier plus fort, mais pour être simplement présents – et entendus.
Le Sahara marocain a besoin de sa diaspora. Non comme une simple mémoire vivante du conflit, mais comme une force d’action, de relais et d’influence. Car tant que cette diaspora restera absente, le silence continuera d’être la seule voix que l’on prête aux Sahraouis en Europe.
La Rédaction


